Katsuragi Haruto [Terminer]

La nuit était tombée depuis plusieurs heures déjà et la chambre n’était éclairée que par la lueur tremblotante d’une bougie posée sur la table de nuit. Appuyé contre le bureau prés de la fenêtre, Haruto jeta un coup d’œil furtif sur l’extérieur avant de continuer à fermer sa chemise blanche portant dans le dos et sur le torse l’emblème de la marine. Cela ne lui plaisait pas mais ses autres vêtements étaient dans la corbeille de linge sale en attente d’être lavé et sa dernière tenue civile était tachée de sang depuis les événements qui c’étaient produit plus tôt dans la journée. Tandis qu’il terminait de s’habiller, les aboiements du chien des voisins de la maison d’en face, l’alertèrent et il jeta à nouveau un coup d’œil sur la rue, remarquant une silhouette familière avançant d’un pas décidé vers la porte d’entrée. Bientôt les cliquetis de la serrure lui indiquèrent que l’homme venait d’entrer dans la demeure. Les battements de cœur d’Haruto se mirent alors à s’accélérer de même que sa respiration, au point qu’il semblait avoir fait un effort physique intense. Les bruits de pas se mirent à retentir dans les escaliers dont l’une des marches particulièrement grinçante avait souvent servit de système d’alarme au jeune homme lorsqu’il flemmardait au lieu de s’entrainer ou d’étudier. Il savait ainsi que son père était sur le point d‘entrer dans sa chambre. Pourtant, cette fois-ci, ce fut la porte de la chambre voisine qui s’ouvrit et se referma quelques secondes plus tard. Haruto resta silencieux et immobile, tendant l’oreille afin de détecter le moindre bruit, même si au fond de lui, il espérait que cela n’arrive pas. Malheureusement pour lui, la voix caverneuse de son père traversa le mur qui séparait les deux pièces, lui sommant de le rejoindre immédiatement. Une goutte de sueur perla sur la tempe droite du jeune homme qui était paralysé par la peur et la honte qu’il risquait de voir dans les yeux de l’homme qui l’avait élevé et qu’il admirait tant mais, lorsque la voix de ce dernier s’éleva de nouveau, Haruto sursauta avant de se précipiter dans le couloir, en direction de la seconde chambre.

Le jeune homme vêtu de son uniforme de marine posa la main sur la poignée de la porte mais il ne trouva pas le courage de tourner celle-ci. Il savait parfaitement ce qu’il allait trouver derrière cette dernière et il craignait de ne pouvoir garder son calme. Il était sur le point de renoncer lorsque son père, ressentant son hésitation, décida de faire ce que son fils semblait incapable de d’accomplir. L’homme était grand, si grand que seul son menton était visible derrière la porte. A coté de lui, Haruto avait l’air gringalet alors que lui-même dépassait aisément le mètre quatre-vingt. Lui aussi était vêtu comme un marine mais les médailles qui trônaient fièrement sur sa poitrine indiquait qu’il faisait parti des haut gradé de l’armée. D’un geste de la main, le père invita son fils à pénétrer dans la pièce. Celle-ci était très différente de la chambre d’Haruto qui était sobrement décorée de cartes marines, d’un drapeau du gouvernement accroché au mur ainsi que quelques armes. Cette pièce, au contraire de l’autre qui avait une vue sur la base de la marine, était éclairée par l’éclat de la lune qui se reflétait sur l’océan et par un nombre impressionnant de livre parfaitement ranger sur plusieurs étagères. Les rideaux en dentelles, les quelques vases remplis de fleurs de même que quelques sous-vêtements féminin qui trainait indiquait que cette chambre appartenait à une femme, sa sœur qui était allongée sur son lit, inconsciente. Incapable de la regarder, Haruto se dirigea vers la fenêtre qui se trouvait à l’ opposer de la pièce, tournant le dos à son père. Un long silence s’installa entre les deux hommes tandis que le marine refermait la porte avant de s’installer à nouveau sur la chaise en bois qu’il avait posé prés du lit de sa fille. Finalement, l’homme se décida à prendre la parole mais sa voix n’avait plus le ton strict et menaçant qu’il avait habituellement.

« Haruto, tu sais que même si je ne suis pas ton père biologique, je t’ais toujours considéré comme mon fils mais en temps que marine, je… j… Je ne peux approuver le meurtre de ces hommes, même s’ils méritaient leur sort. »

Sa voix sembla se briser et de rage, il frappa le sol d’un violent coup de pied. C’était la première fois que le jeune homme voyait son père dans un tel état et ressentir la frustration de celui-ci lui donnait l’impression que quelqu’un lui avait assené un coup de poignard. Portant la main sur son torse, Haruto se mit à caresser le pendentif qu’il portait autour du comme il avait l’habitude de le faire lorsqu’il était stressé. Il s’agissait du croc d’un roi des mers que son père biologique lui avait offert lorsqu’il était encore très jeune. A chaque fois qu’il s’adonnait à ce rituelle, le jeune homme ne pouvait s’empêcher de repenser à ses vrai parents et à la vie qu’il avait vécu avant d’être adopté par cet homme. C’était dans le nouveau monde qu’il avait vu le jour, sur une île qui fut malheureusement en proie à une guerre entre deux clans de pirates qui voulaient acquérir le contrôle de ce territoire. Au final, tout le monde avait perdu puisque les hors-la-loi s’étaient entretués, non sans prendre le soin de massacrer les pauvres civils qui c’étaient retrouvés, malgré eux, pris entre deux feux. Ses souvenirs étaient assez flous concernant le début de sa vie car il n’était âgé que de cinq ou six ans à cette époque et au fil du temps, il en avait même oublié le visage de ses parents. Il se souvenait que sa mère avait de long cheveux noir de jais ainsi qu’une voix douce et que son père était un homme grand et fort, qui aimait rire. C’est derniers étaient boulanger et derrière leur maison il y avait un moulin pour faire de la farine ainsi qu’un immense champ de blé aussi étincelant que l’or. Il se souvenait aussi de l’odeur de pain chaud le matin et du tintement de la clochette accroché à la porte de la boulangerie lorsque les clients entraient. Malheureusement, tous ses beaux souvenirs étaient rapidement effacés par les cris de terreur et les hurlements des boulets canons qui fusaient dans tout le hameau. Il se rappelait de sa mère qui le força à se cacher dans une cave que son père avait creusé sous la maison pour y entreposer quels réserves d’eau et de nourriture en cas de coup dur et dont l’entrée était cachée sous le tapis du salon. Il se souvenait aussi du terrible hurlement que poussa sa mère lorsque des pirates entrèrent dans la boutique et des sanglots de son père lorsqu’il la retrouva sans vie étendu sur le sol, rapidement suivit par plusieurs explosions qui firent trembler le sol. Puis, finalement au bout de quelques heures, le silence total.

Finalement, Haruto avait été secouru par un équipage de marine quelques jours plus tard et il fut adopté par un jeune colonel qui s’apprêtait à prendre le commandement d’une base sur l’une des blues afin de s’occuper sa fille, suite au décès de sa propre épouse. Sortant de sa rêverie passagère, le jeune homme se retourna pour observer son père adoptif mais il stoppa net son mouvement en se souvenant de ce qu’il risquait de voir. Au lieu de cela, il reporta son attention sur ce qui se trouvait devant lui, à savoir une étagère pleine de livre. Ces ouvrages, il le savait, traitaient d’histoire, de civilisation ancienne et de tout ce qui pouvait avoir un rapport avec l’archéologie. C’était une passion que le jeune homme et sa sœur partageait depuis qu’il se connaissait même s’ils ne se passionnaient pas forcement aux mêmes choses. L’intérêt d’Haruto était porter sur les récits de guerres, la stratégie, les légendes traitant de héros et de chef de guerre célèbre ainsi que l’expertise d’armes ancienne alors que la jeune femme s’intéressait plus aux objets rares et précieux et elle disait souvent qu’elle voulait devenir pirate pour découvrir des artefacts rares et anciens. D’ailleurs, à l’occasion d’un voyage sur l’île d’Ohara, les deux jeunes passèrent un examen et finirent par obtenir le titre d’archéologue. Toutefois, avec le temps, ils finirent tout les deux par s’orienter vers une carrière au service du gouvernement. Haruto décida de suivre les trace de son père en s’engageant dans la marine et très vite il obtint le grade de sergent tandis que sa sœur se vit offrir un poste dans l’administration et parti pour Marijoa. C’est d’ailleurs à ce moment là que tout commença basculer.

« Cesse de jouer les gamins et retourne-toi immédiatement ! C’est le moment alors montre toi courageux. »

La voix du père était de nouveau aussi puissante et pleine d’assurance qu’à l’accoutumé, ce qui surprit Haruto qui sursauta comme si on venait de lui renverser un seau d’eau glacé sur la tête. Son père avait raison, un tel manque de courage ne lui ressemblait pas, lui qui était d’ordinaire si plein de vie et d’énergie. Cela lui avait d’ailleurs joué des tours et freiné sa carrière dans la marine. Il était assez connu pour sa violence lors des entrainements et avait envoyé un grand nombre de ses camarades à l’infirmerie avec un bras ou une jambe cassé, si ce n’est plus. Il prit alors une grande inspiration histoire de reprendre un peu de constance puis il se tourna enfin vers son père et baissa les yeux pour observer sa sœur allongée sur son lit, dans un profond coma. La faible lumière qui parcourait la chambre n’était pas suffisante pour éclairer le visage de celle-ci mais Haruto savait, parce que c’était lui qui l’avait trouvé, qu’il était couvert de coupures et d’hématomes.

« Les hommes que tu as tués travaillaient pour le gouvernement mondial. J’ai eu beaucoup de mal à obtenir des informations mais apparemment ta sœur aurait mis son nez dans une affaire que le gouvernement mondiale ne veut pas ébruiter. C’est pour cela qu’ils ont envoyé des assassins. Il avait probablement envisagé de faire passer cela pour un accident mais maintenant, ils ont prévu de te faire endosser le meurtre. Il faut dire que ton dossier militaire ne plaide pas en ta faveur et ta réputation non plus. J’ai aussi apprit qu’une autre équipe s’apprêtait à arriver pour terminer le travail c’est pourquoi, j’ai décidé d’en finir. Puisque ma fille doit mourir, alors que ce soit sans souffrance. »

L’homme fouilla dans sa poche et sorti une petite boite métallique contenant une seringue dans laquelle on pouvait distinguer un liquide translucide. Haruto l’observa sans dire un mot puis il baissa la tête et attrapa la main de sa sœur. Le marine l’imita puis il se pencha vers son enfant pour lui murmurer quelques mots avant de planter délicatement l’aiguille dans la veine de son bras. Un silence pesant tomba alors sur la pièce tendit que les deux hommes observait les mouvements de la poitrine de la jeune femme montant et s’abaissant au rythme de sa respiration, de plus en plus lent, espacé, puis finalement inexistant. Haruto pensait qu’il ressentirait au fond de lui une explosion de colère semblable au moment où il l’avait découverte alors qu’elle revenait pour passer quelques jours en famille à l’occasion de l’anniversaire de son père mais tout ce qu’il ressentait, c’était un vide profond, comme celui qu’il avait ressenti à la mort de ses parents biologique. Environ une heure passa avant que l’un des deux ne se décide à bouger. Le père se leva calmement et sorti de la pièce pour s’engager dans les escaliers. Comme toujours la fameuse marche se mit à grincer sur son passage. A son tour le jeune homme se mit à marcher mais il se dirigea vers la fenêtre et observa la rue. Il remarqua alors le mouvement d’une ombre qui disparu si rapidement qu’il aurait pu croire qu’il hallucinait mais, son instinct lui disait que ce n’était pas un effet de son imagination. Soudainement, le grincement de l’escalier le fit se retourner si vite qu’il renversa une chaise qui souleva une planche sur le sol en tombant, dévoilant une cache secrète. Curieux, Haruto passa sa main à l’intérieur et en tira un petit carnet qu’il ouvrit au hasard avant de le refermer et de le cacher dans sa poche non sans avoir retenu le mot « Ponéglyphe ». Il ne savait pas ce que cela voulait dire mais il prit la décision de le garder pour lui. Son père entra dans la pièce en portant un sac qu’il lança à son fils et lui fit signe de le suivre rapidement.

Tout deux dévalèrent l’escalier et se dirigèrent vers le bureau du marine. Le jeune homme savait que son père avait compris qu’ils étaient en danger alors il ne discuta pas. Celui-ci attrapa un magnifique sabre posé sur un présentoir puis il fit quelques pas en direction d’un tableau représentant sa défunte épouse et le fit pivoter légèrement, dévoilant un coffre derrière. Il fouilla dans sa poche à la recherche de la clé et ouvrit la porte blindé. Dehors, l’aube naissante éclairait de plus en plus la maison. Le marine sortit de son coffre deux liasses de billet qu’il tendit à son fils ainsi qu’un petit coffret qu’il posa sur son bureau. Pendant qu’Haruto rangeait soigneusement l’argent que lui avait confié son père dans son sac, celui-ci dévoila le contenu du coffret, à savoir un fruit étrange couvert de motifs en spirale.

« C’est un fruit du démon. Je ne sais pas de quelle sorte mais je comptais te l’offrir lors de la fête qui était prévu pour la promotion qu’on devait normalement t’accorder dans deux mois. Je veux que tu le mange et que tu partes par la porte de derrière. Je vais m’occuper de faire diversion pour te permettre de fuir. Je sais ce que tu penses mais, tu dois vivre pour nous venger. Fais leur payer pour ce qu’il nous on fait endurer. »

Étrangement, ces paroles sonnaient faux dans la bouche d’un homme qui avait voué sa vie à la justice toutefois le marine était avant tout un père qui venait de perdre sa fille et qui risquait de voir mourir son autre enfant. Haruto n’avait jamais rêvé de devenir un pirate mais il n’avait plus le choix et maintenant qu’il n’avait plus rien à perdre, il ne se gênerait pas pour exercer sa vengeance mais il avait aussi un autre objectif. Il voulait enquêter et découvrir le secret que le gouvernement cachait au point de faire assassiner sa sœur. Résolut à survivre, le pirate croqua dans le fruit du démon, grimaçant légèrement à cause du goût puis il enlaça son père tendrement, sachant que c’tait probablement la dernière fois qu’il le voyait, avant de se diriger vers la porte et vers sa nouvelle vie.